HOMMAGES A NOS CONFRERES  décédés en 2015


 
 
Hommage à Juliette Thiébaud - Juin 2015
 

François, Claude, Olivier, chers amis de Juliette,

J’ai connu Juliette et son mari, Jean, peu de temps après mon installation aux Archives départementales en 1981 ; Ils ont peut-être été mes plus anciens lecteurs, comme on dit familièrement aux Archives. C’étaient en effet de fidèles et studieux chercheurs, défrichant aux AD les archives communales de Tournon et celles des notaires. Tous les deux Francs-Comtois, Juliette était de Lure et, au cours de sa réception comme membre de l’Académie des sciences, lettres et arts de l’Ardèche, le 29 novembre dernier, je l’avais plaisantée sur le curieux nom des habitantes de sa ville natale, les Luronnes. La passion pour l’histoire de Tournon, partagée par Juliette et Jean, était aussi vécue comme un moyen de s’intégrer à cette ville. Ils s’y étaient installés en 1973, à la suite de la mission confiée à jean Thiébaud de construction et de direction de l’usine Caravelair ; dès lors ils vont s’intéresser à l’histoire de leur maison, située dans la vieille ville, Place Paul Sevin. Son mari ayant encore des activités professionnelles, Juliette va faire sa place en s’impliquant dans la vie municipale :

- conseillère municipale dans la municipalité Tourasse ( 1983-1989 ) puis dans la municipalité Frachisse (1989-1995) ;

- adjointe puis successeur de M. Pontiès comme conservateur du château-musée de Tournon. Elle se méfiait d’ailleurs de ce titre, n’étant pas comme elle disait une professionnelle de la conservation, et elle rectifiait quelquefois malicieusement en se disant chargée de conservation.

 Cela n’a pas empêché ladite chargée de conservation de s’investir pleinement dans la rénovation du musée : salle Forot aménagée grâce à la donation faite au département par Mme Forot, salle Hélène de Tournon, création en 1985 de l’association des Amis du Musée, expositions. Remue-ménage en 1984 : un jeune chartiste plein d’entrain, Jacques Mourier propose une exposition et un colloque sur l’histoire de la ville, en collaboration avec les Archives départementales. Les Tournonais peuvent découvrir les parchemins de leurs ancêtres.

Et puis il y eut ce coup d’éclat, qui m’étonne encore : la reconstitution du triptyque du cardinal de Tournon à partir de deux panneaux conservés au lycée et d’un panneau racheté par le Musée du Louvre, exercice de haute diplomatie et de séduction auprès de M. Rosenberg, médiatiquement connu comme l’homme à l’écharpe rouge. Mais que de tracas pour son installation dans la chapelle du château : le Louvre et les Monuments historiques ne plaisantent pas sur les conditions matérielles de conservation !

Il n’y a pas que le musée, toute la ville l’intéresse. Ses publications sur les rues et les maires de Tournon sont connues ; moins connues sont ses actions de sauvegarde du patrimoine :

- protection et restauration des objets de l’église Saint-Julien, avec l’ami Christian Caillet ;

- informations données au service régional de l’archéologie sur les travaux urbains et la topographie ancienne, permettant l’étude par Joëlle Dupraz  des vestiges antiques trouvés au pied du château ;

- avec Jean création d’une association pour la sauvegarde de la bibliothèque du lycée, premières restaurations de livres.

La notoriété aidant, Juliette entre dans les CA de la Société de sauvegarde des monuments anciens et de MATP.

C’est évidemment dans le domaine des archives que j’ai le mieux connu, et apprécié, Juliette.

Ayant naturellement un esprit d’ouverture, elle répondait toujours présent pour accueillir une exposition des Archives départementales au château. En plus il y avait la terrasse du château, la courbe majestueuse du Rhône, un verre de Saint-Joseph : l’archiviste était content.

En fait je dois avouer que Juliette s’est révélée une inlassable traqueuse et une informatrice de premier ordre. Elle est à l’opposé de l’érudit qui préserve jalousement ses sources ; sa philosophie, qui plaît au directeur des archives, est simple : tout doit aller aux Archives !

De bons souvenirs communs :

- dès 1981 la récupération de documents importants et oubliés provenant de l’ancienne annexe des AD créée vers 1950 dans le château par J. de Font-Réaulx, chargé de l’intérim des archives ardéchoises ;

- des acquisitions faites par son entremise : papiers de l’Union générale des Rhodaniens, de Joseph Parnin, de Mme L’Herbier-Montagnon, de la famille Deville-Montgolfier, de Melle Villard, pour ne citer que les plus importants.

Elle contribue également au sauvetage des archives anciennes de l’hôpital de Tournon, déposé aux ADA, et à celui de la famille de Neuvezel, transmis aux AD de la Haute-Saône.

J’ai eu le plaisir de faire avec Juliette quelques expéditions archivistiques : à Montmelas dans le Beaujolais, sur les traces du régent du collège Jean Pellisson et des Tournon ; à Avrilly, en Bourbonnais, toujours sur les traces des Tournon. Un seul bémol : Juliette n’appréciait pas la voiture des Archives car non pourvue de clim.

Nos dernières sorties : à Saint-Félicien pour l’association de la maison de Charles Forot, une de ces personnalités ardéchoises si intéressantes qu’elle avait contribué à faire connaître.

Comment résumer une personne ? Des images et des impressions restent fixées dans la mémoire : son sens de l’accueil dans sa belle maison, entre ville et colline, son courage face à la maladie de Jean, face à ses nombreux accidents de santé, sa générosité. Du haut de son escalier elle me fait signe : au revoir !

 

                                                                                                                                                                                                                                D. D.

 

 

 

 





Créé avec Combo - Société Tac-Multimédia