Année 2014

 

IN MEMORIAM

 

Gérard Leÿnaud

Après une longue maladie, notre confrère, le Docteur Gérard Leÿnaud est décédé le 6 décembre 2014. Il était membre du Conseil d’administration et de la Commission du dictionnaire biographique, pour lequel il avait rédigé de nombreuses notices. Malgré la distance qui le séparait de son Ardèche natale, en raison de son activité de chirurgien à Montluçon, il ne manquait jamais une réunion sans une excuse impérieuse, quitte à prendre la route nuitamment. En collaboration avec un confrère chirurgien, membre de l’ASLA, il avait préparé une série de conférences, dans le cadre de notre académie. Il était membre de l’Association française de chirurgie, auteur de publications dans sa spécialité, dont compte tenu du nombre, il ne nous avait communiqué que les titres des quatre dernières. Au seuil de la retraite il envisageait de se consacrer un peu plus à l’ASLA. Notre académie a malheureusement perdu un membre talentueux et efficace. Il plaçait un tréma sur le « ÿ » de son nom, car il tenait beaucoup à ce que l'on conserve la prononciation traditionnelle languedocienne.

Il repose au cimetière de Saint-Andéol-de-Vals dans le caveau familial.                                                                                                       Daniel Bouix

 

 Odette Pontal

             Née à Antraigues en 1918, Odette Pontal (née Gauthier) est décédée à Paris le 21 août 2014. Élève à l’Ecole des Chartes, elle se tourna vers son pays d’origine pour le choix de son sujet de thèse chartiste, Les seigneurs de Montlaur des origines au Xe siècle, soutenue en 1943.On peut penser que Jean Régné, archiviste départemental, a joué un rôle dans ce choix et qu’il s’est réjoui du souffle de jeunesse apporté dans son vieux dépôt de la rue de Vernon par deux étudiantes chartistes, O. Pontal et Nicole Maufront, cette dernière tournée vers les guerres de religion. Elle ne se dirigea pas immédiatement vers les professions dévolues aux chartistes, peut-être en raison de la carrière préfectorale de son mari, Gaston Pontal, et ce n’est qu’en 1958 qu’elle entra à l’Institut de recherche et d’histoire des textes, où elle fut ingénieur de recherche jusqu’à sa retraite en 1983. C’est dans cet Institut qu’O. Pontal va consacrer l’essentiel de ses travaux aux conciles et aux synodes de la France médiévale. Reprenant les recherches antérieures effectuées par une équipe de jeunes chartistes, elle publie en 1963 un Répertoire des statuts des diocèses de l’ancienne France, du XIIIe à la fin du XVIIIe siècle. Suivront plusieurs publications considérées comme des ouvrages de référence : en 1971 Les statuts synodaux français du XIIIe siècle, T. I, Les statuts de Paris et les synodes de l’Ouest, en 1975 Les statuts synodaux (collection typologie des sources ), en 1989 une Histoire des conciles mérovingiens, en 1995 Les conciles de la France capétienne jusqu’en 1215. On lui doit également une tentative de synthèse, Clercs et laïcs au Moyen Age, 1990. Parmi ses articles, toujours liés aux sujets précités, signalons son savoureux article sur Le différend entre Louis IX et les évêques de Beauvais ( BEC, 1965 ). Ces travaux lui valurent plusieurs prix accordés par l’Académie des inscriptions et belles lettres et par l’Académie Française. La retraite venue, O. Pontal n’oublia pas son pays d’origine, où elle avait gardé sa maison d’Antraigues, et donna à la Revue du Vivarais trois articles dont un, en 1988, reprenant sa thèse de 1943, Les seigneurs de Montlaur dans la région cévenole des origines au XVe siècle.

D. Dupraz

Pierre Aurousseau

Notre confrère Pierre Aurousseau est décédé en septembre 2014.

Pierre Aurousseau a commencé sa vie professionnelle  dans la région parisienne, mais c’est au lycée Marcel Gimond d’Aubenas qu’il  a fait l’essentiel de sa carrière (1973 – 1997). Professeur de Physique-Chimie, pédagogue exigeant et respecté, il a été reçu à l’agrégation.

Sa passion pour la photographie  s’est prolongée par un investissement croissant dans le monde de la botanique. Il fit, à ce sujet, une communication d’un grand intérêt  devant les membres de l’ASLA en novembre 2009. Ses confrères de la Société botanique de France lui confièrent les responsabilités de la trésorerie, mission dont il s’acquitta avec sa rigueur habituelle.

Y. M. 

 

Michel GUIGAL

Le 2 avril 2014 s’est éteint un ami, bien connu à MATP et de tous ceux qui s’intéressaient au patrimoine de l’Ardèche. J’ai connu Michel au début des années 80, comme lecteur des Archives départementales. Il y était en effet assidu, avec sa femme Paulette, et traquait ses ancêtres dont il disait en souriant qu’ils étaient tous originaires d’un mouchoir de poche autour de Quintenas, son village natal. Au fil du temps je découvrais que notre Annonéen avait de multiples talents, qu’il exerçait dans des domaines parfois inattendus. Vétérinaire, sillonnant les fermes du Haut Vivarais, il était aussi capable de recoudre la peau d’un boa du parc de Peaugres et, dans sa jeunesse, il joua de l’accordéon pour animer des bals de village. Passionné par le passé de son pays, il avait créé un groupe archéologique, d’abord au sein de la MJC, rattaché ensuite aux Amis du fonds vivarois. Il enchaîna prospections et fouilles à Andance, Talencieux et Limony. Il s’initia à la restauration et se lança dans celle de la mosaïque de Limony. Cette connaissance du territoire lui valut d’être nommé correspondant de la direction régionale des Antiquités historiques. Sa passion du patrimoine l’amena à la création en 1977 des Amis du fonds vivarois, aux activités multiples : recherche de documents, conférences, voyages, expositions, sans oublier les grandes manifestations des bicentenaires de la montgolfière et de Marc Seguin en 1983 et 1986. Le lien avec les Archives départementales s’affirmait par une visite collective de l’association en 1983, visite pour laquelle j’avais préparé de nombreux documents concernant Annonay

 

C’est peut-être dans le domaine de la généalogie que ses efforts rencontrèrent le plus de succès. Au-delà de son intérêt individuel, M. Guigal avait bien perçu les enjeux collectifs de cette nouvelle passion française : comment faciliter l’accès aux sources et comment canaliser les efforts individuels vers un but utile à tous les chercheurs ? Très vite il mit au point sa méthode : réaliser des fac-similés des registres paroissiaux conservés en mairie avec un photocopieur portatif, faire des tables alphabétiques de ceux-ci, relier le tout en volumes facilement prêtables par la poste. A partir des années 70 la photocopie des registres, jugée nuisible aux documents, était proscrite mais, s’agissant d’une opération qui n’était réalisée qu’une fois sur le même document, dans une perspective collective, je n’ai pas jugé, en tant que fonctionnaire chargé du contrôle sur les archives publiques, devoir m’opposer à cette pratique. La formule se mit en marche sous l’égide des Amis du fonds vivarois et, fort de son succès, M. Guigal me proposa de réunir aux Archives toutes les bonnes volontés, avec l’objectif de créer une véritable association départementale. Excédé comme beaucoup de mes collègues par la multiplicité des requêtes individuelles, particulièrement nombreuses en Ardèche, j’étais ravi d’avoir enfin un interlocuteur unique et compétent. Le 27 septembre 1989 une trentaine de personnes  décidèrent donc de créer la Société des amateurs de généalogie de l’Ardèche, plus connue sous le nom de SAGA. Dès lors la « machine » tourna à plein régime, avec plusieurs équipes, dont une affectée aux registres protestants et une autre à la reliure, et se dota, sans subvention, grâce au système des prêts, de photocopieurs et d’ordinateurs. Les résultats furent impressionnants : millier d’adhérents rapidement atteint, couverture quasi complète des paroissiaux, informatisation des tables, numérisation. Toujours soucieux du bien collectif, M. Guigal proposa de mettre à disposition du Département les CD-Roms réalisés afin de permettre l’accès à tous les paroissiaux de l’Ardèche sur le site du Conseil général, ce qui fut entériné par une première convention en 2005. Quel chemin parcouru ! Travail en tous cas reconnu par deux lettres de félicitations de Madame de Boisdeffre, directrice des Archives de France, en 2001 et 2005.

 

Il est impossible de tout dire. N’oublions pas ses nombreuses contributions aux cahiers de MATP, à la Revue du Vivarais, au bicentenaire de la Révolution à Annonay, ses publications, dont les fameux mémoires de l’abbé Léorat-Picancel. En ce qui regarde directement l’activité des Archives départementales M. Guigal, parfaitement désintéressé, a toujours agi en faveur de leur enrichissement. Une anecdote : ayant retrouvé et pris en charge des archives du marquis de Satillieu, je lui avais part de ma déception de ne pas avoir retrouvé la correspondance de deux éminents Ardéchois adressée à celui-ci. Quinze jours plus tard mon honorable informateur m’amenait les liasses avec un sourire mi-modeste, mi-triomphant.

 

          Et voilà l’image que j’aime garder de notre ami, imprimée dans la presse locale, celle du Docteur Guigal, les lunettes retenues par un cordon, expliquant avec bonhomie à un public villageois l’intérêt et les sources de la généalogie, avec cette bonhomie qui devait l’accompagner dans son travail de vétérinaire.

                                                                                                                                                                              D. Dupraz

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  

 

IN MEMORIAM

 

Année 2017

Simon-Pierre PERRET

Notre confrère est décédé le 13 mai 2017 dans sa 82e année.

Simon-Pierre Perret était cardiologue. Musicologue reconnu, il avait publié un ouvrage sur le musicien et compositeur Albéric Magnard, avec Harry Halbreich (Fayard, 2001), ainsi que sur Paul Dukas, avec Marie-Laure Ragot (Fayard, 2007).

En 2016 à Privas, notre confrère avait eu l’occasion de nous présenter sa conférence sur l’œuvre d'Albéric Magnard.


Gérard Cholvy, notre membre d’honneur,  est décédé le 17 juin 2017 à Montpellier à l’âge de 85 ans. Il est l’auteur d’une quarantaine d’ouvrages et de très nombreux articles concernant l’histoire de Languedoc et de l’histoire religieuse de la France.

Notre confrère était membre de l’académie des Sciences et Lettres de Montpellier, de l'Académie de Lascours, de la Société archéologique de Béziers, de la Société d'histoire religieuse de la France ainsi que membre d'honneur du comité des Annales du Midi.

 

Année 2016

 Jean Leyder


Notre confrère est décédé, mi-mars à l'âge de 95 ans. Il était né en 1922 à Algrange en Moselle (près de la frontière du Luxembourg). Depuis quelques temps la fatigue l'avait gagné et il n'assistait plus aux réunions des associations dans lesquelles il avait des responsabilités.


Jean Leyder était retraité depuis 1983. Son activité professionnelle, l'avait conduit aux postes de conseiller de l'administration universitaire et d'agent comptable de l'Université Scientifique et Médicale de Grenoble. Il a habité en Ardèche de 1959 à 1965, puis nommé à Grenoble il est revenu en Ardèche, à Ucel, dès sa retraite en 1983.


Âgé de 20 ans en 1942, il subit les affres de la Guerre de 39-45, avec l'incorporation de force dans l'armée allemande. A cette époque en Alsace-Lorraine, des séparations avec des conséquences douloureuses se sont produites dans les familles, entre ceux qui avaient quitté à temps le terroir, pour se réfugier dans le sud de la France, et ceux qui étaient restés au pays. A plusieurs reprises nous avions échangé sur ces drames que je connaissais, pour avoir vécu et travaillé dans cette région pendant plus de dix d'années. C'est pour cette raison qu'il m'avait confié un mémoire qu'il avait intitulé :


« Un devoir de mémoire

Témoignage d'un Français, Alsacien-Lorrain – Soldat allemand contre son gré. »


Ce petit travail comme il le disait, mais tout de même de 55 pages, était dédié à son épouse, ses enfants et petits enfants, il était accompagné du courrier, ci-après :


Je me suis enfin décidé à vous envoyer un petit travail sur les aventures d'un Alsacien-Lorrain, devenu élève-aspirant allemand pour ne pas aller en Russie, puis officier d'Occupation rhénane, Entre temps, membre de « l'Afrika-Korps », j'avais été incarcéré au passage du Brenner et traduit en cour de justice militaire allemande pour deux crimes passibles de la peine de mort : essai de désertion et démoralisation du moral de l'armée.

L'absence des témoins à charge le jour du procès à Naples, abattus le matin même, dans l'avion qui les amenait d'Afrique, m'a sauvé la vie.


J'avais l'intention de proposer à l'Académie de faire uConac ne conférence sur mon vécu un peu particulier, mais les suites d'un accident survenu le 28 octobre… ne me permettent plus d'envisager la réalisation de cette intention…


Ce témoignage, semble avoir été remis, en plus de la famille à seulement deux personnes. Il mériterait d'être plus largement diffusé.


Notre confrère était entré à l'ASLA en 1993, parrainé par le président de l'époque, Jacques Avias. Compte tenu de ses compétences, il est devenu rapidement le commissaire aux comptes de l'A.S.L.A., et cela jusqu'en 2006, sous les mandats d'au moins quatre trésoriers. C'est probablement parce qu'il connaissait parfaitement les contraintes des trésoriers qu'il était toujours le premier à régler sa cotisation à notre académie et souvent sans attendre l'appel. De plus, il avait maintenu le montant de sa cotisation de membre titulaire malgré son passage à l'honorariat.

Malheureusement à la suite d'un accident de la circulation - renversé sur un passage piéton – ses déplacements étaient devenus difficiles. Son état de santé déclinant ne lui permettait plus d'assister à nos séances.


Il était membre d'une dizaine d'associations, dont l'ADAPEI ainsi que de l'AMOPA (association de l'ordre des palmes académiques).

 

 

Notre confrère était l'auteur de deux ouvrages sur la comptabilité dans les établissements d'Enseignement supérieur.


Il était chevalier des Palmes académiques et chevalier de l'ordre national du Mérite.

 

Daniel Bouix  

 

 

 

Michel Rouvière

Notre ami Michel, membre de l’Académie, section Arts, depuis 1996, nous a quittés le 12 novembre après une courte maladie.

J’ai dû faire sa connaissance peu après mon arrivée dans le département en 1981 en découvrant ses premières publications. Mais Joëlle m’a rappelé à l’ordre : elle a connu celles-ci avant moi en faisant de la bibliographie sur l’architecture paysanne, en liaison avec ses recherches sur l’habitat médiéval de Brandes, entre 1977 et 1980. Avec les premiers tirés à part de ses articles, j’apprends l’existence du CERAV, association spécialisée dans le domaine de la pierre sèche et de l’architecture dite vernaculaire, dont j’acquiers les volumes annuels pour la bibliothèque des Archives. Il est rare de ne pas y trouver une trace ardéchoise, grâce au « veilleur » Rouvière. Des liens d’amitié se créent ensuite, par les rencontres aux Archives départementales, des sorties avec CARTA et la Sauvegarde, des invitations dans son cher Vinezac. Dans son terroir il nous guide vers le dolmen de la Queyrie, les roches de grès aménagées comme « plejadous » ( plioirs ) et maies de fouloirs ( ce terme a remplacé celui de cuve vinaire ), nous montre les traces d’aménagement et de barrage sur la rivière la Lande.

Mais un rappel biographique s’impose, en partie puisé dans le texte de M. Auboiron, publié dans le volume d’hommage du CERAV de 2014-2015 ( n°38-39 ), visible sur Internet. Né à Vinezac en 1933 dans une famille paysanne, Michel a fait des études qui se sont arrêtées avec le certificat d’études et une classe de 6e au collège de Largentière. Un don se révèle déjà, le dessin et la peinture. Une institutrice lui prête un livre sur Van Gogh : on retrouve l’influence de celui-ci sur une toile datée de 1953 ( il a 20 ans) représentant des oliviers aux formes tourmentées. Il a également fréquenté la Petite Chaumière d’Alba, tentative de création d’un lieu artistique des années 50 dans un lieu en voie de dépeuplement. Après son service militaire il reprend le travail dans la petite ferme familiale mais c’est la catastrophe du gel de 1956, qui, si ma mémoire est bonne, le décide à abandonner l’agriculture et à partir. Dans la région parisienne il travaille d’abord comme carreleur puis comme responsable de décoration et installateur de cuisine. Il revient régulièrement à Vinezac pour les vacances et s’y installe définitivement la retraite venue.

Michel, bien sûr, pour nous, c’est l’homme de la pierre, du travail de l’homme pour tirer le meilleur parti de terroirs méditerranéens particulièrement difficiles et pauvres en eau. Il a arpenté le bas Vivarais, ses faysses, ses clapas, ses grangettes et autres capitelles, il a redécouvert les jardins suspendus de Labeaume, observé les méthodes d’arrosage, puits, gourgs et manlèves. Le haut Vivarais n’était pas dans son fief mais je garde le souvenir d’une belle sortie avec l’association Ladeno à Désaignes où son expertise avait été mise à contribution. Sa rencontre avec Christian Lassure, professeur d’anglais et fondateur en 1977 du CERAPS, devenu CERAV, lui ouvre des opportunités d’échanges et de publication. La liste de ses publications est longue : 130 titres ! Vous la trouverez dans l’excellente bibliographie publiée sur le site du Cerav mentionné plus haut. Dès 1975 il publie en solo une plaquette sur les capitelles de Vinezac. Un coup d’éclat en 1977 : il fait connaître ses premiers travaux d’archéologie agraire dans une revue très connue, Archeologia. Sa collaboration avec le CERAPS puis le CERAV démarre en 1977 dans le premier tome de la collection. Une des préoccupations constantes des fondateurs de ce centre a été de tordre le cou aux affabulations attribuant toutes les structures en pierres sèches à des civilisations préhistoriques, les fameuses « bories » devenant des cabanes gauloises, et de restituer leurs véritables fonctions et leur datation, en général d’époque moderne. Cette démarche, associant étude rigoureuse des vestiges, relevés et recherche d’archives, plaisait à notre confrère. Il fit la démonstration de la fécondité de celle-ci avec son étude de 1986 sur le bâti de Vinezac d’après les deux compoix conservés des XVIe et XVIIe siècles. La découverte au mas des Sauzèdes d’une tuile portant le nom du propriétaire de 1653 établissait le lien entre objets et archives. Ce genre d’étude, comme celle menée en 1983 sur les aménagements « sub actuels » de l’oppidum de Jastres nord ( lotissement de communaux ), permit d’éviter l’égarement à un étudiant archéologue lancé sur des traces antiques par un professeur mal informé. Son expérience de bâtisseur en pierres sèches lui permit également de proposer des évaluations du temps nécessaire à une famille nombreuse pour aménager un versant, temps finalement assez bref (cf.son article de 2004 sur Louis Roussel, bâtisseur de terrasses à la fin du XIXe siècle) et de préparer un manuel de restauration de murs, publié par le Parc national des Cévennes en 2002. En matière de publication sa plus grande fierté fut de contribuer par des articles à l’Encyclopedia of vernacular architecture of the world, publiée à Cambridge en 1996. Grâce à la bibliographie déjà mentionnée je découvre qu’il obtint une certaine audience officielle en étant invité en 1994 par le ministère de l’Environnement à faire une communication sur les bocages lithiques.

Plus que publier Michel aimait faire découvrir. Il l’a prouvé en réalisant l’exposition « Paysages de pierres, paysage de vie », sous l’égide de MATP, qui a circulé dans une centaine de localités et qui va être installée à l’écomusée de Chirols, et en multipliant les conférences illustrées de diapositives et les sorties collectives.

Quelque chose le tracassait : mener à bonne fin un livre sur le Gras de Vinezac, qu’il connaissait à fond et où sa famille avait exploité des terres. Assez souvent il m’envoyait des échantillons de montages de photos, avec ses commentaires. Photos remarquables, y compris celles prises en ULM, montrant des cas extrêmes de dérochement et d’aménagement de cellules de culture en des endroits improbables. Travail inachevé mais non perdu car Michel, prévoyant, avait déjà amorcé un dépôt de ses documents aux Archives départementales. Celles-ci, avec les fonds Carlat et Rouvière, seront peut-être les mieux dotées en France sur le plan « architecture rurale ».

Revoyons quelques traits de la personnalité de Michel. Généreux du point de vue restitution d’un savoir au public, il l’était aussi comme « informateur » sur les archives. C’est grâce à lui que j’ai pu récupérer quelques archives en déshérence (cf. la caisse Vital, feudiste). Son talent de dessinateur est éclatant dans la manière dont il savait schématiser la coupe d’un versant en terrasse, restituer une fontaine voûtée ou une cabane. Dessin et poésie, jardin plus secret, pouvaient se retrouver sur une carte de vœux. Pratiquer réellement ses connaissances, il le faisait en remontant des murs ou en taillant ses oliviers. Talent photographique : regardons son magnifique champ d’asphodèles ouvrant le site internet de « l’architecture en pierres sèches ». Et puis il y avait son franc parler ! Ce n’était pas désagréable de l’entendre vitupérer sur une opération Land Art et sur les institutions qui la finançaient. Il aurait souhaité au contraire plus d’engagement des pouvoirs publics en matière de protection de nos paysages. Personnellement Michel m’a aidé à comprendre que l’Ardèche n’était pas un pays sauvage, malgré les slogans un peu creux du tourisme officiel, mais que c’était plutôt un pays très « construit », devenu « ensauvagé » avec la déprise agricole. Somme toute notre confrère est sans doute un remarquable exemple d’autodidacte, issu de la paysannerie, autodidacte ayant quand même reçu la formation de l’école de la République ( il aimait dire qu’il avait fait HEC, hautes études communales ! ), un autodidacte qui fait honneur à notre département.

 

D. Dupraz

      

 

Gérard Conac

Le 30 décembre 2016, disparaissait notre confrère Gérard Conac. Tant dans notre académie, qu'aux Amis de Joviac, association qu'il avait fondé en 1989, nous avons été surpris de ce soudain départ, même si depuis quelque temps son état de santé nous inquiétait.


Il était né à Vorey-sur-Arzon, près du Puy-en-Velay. Il était fier du nom que portait sa mère, Marie Taulemesse, ce qui l'ancrait un peu plus en Ardèche.


Depuis près de trente années Gérard Conac avec son épouse Françoise, ont entretenu, restauré et mis au jour les trésors oubliés du Domaine de Joviac, tant pour les bâtiments, que pour l'ancienne l'exploitation agricole et l'industrie naissante de la soie. Dans le même temps ils ont ouvert le site gracieusement aux activités culturelles des associations locales. En 2014, Gérard Conac avait été particulièrement honoré par l'inauguration d'une plaque commémorant la création de l'Université de la Paix à Verdun, décidée lors du colloque sur la Paix à Joviac en 1997. En même temps, Rochemaure remerciait aussi Gérard, pour les 25 années de colloques, de conférences, d'expositions et de concerts, produits à Joviac.


Notre académie, dans laquelle Gérard Conac était entré en 1991, a bénéficié elle aussi de son hospitalité, car deux assemblées générales et quatre séances solennelles, se sont tenues à Joviac. De même, l'A.S.L.A., a participé activement à certains colloques : L'économie ardéchoise, La Constitution de l'An III, puis André Siegfried.


Notre confrère Gérard Conac, était agrégé de Droit Public (reçu 1er), docteur en Droit et diplômé d'études supérieures de Sciences économiques.


Nous citons ici que quelques postes qu'il a occupés : il a été directeur de la recherche à l’Institut international d’Administration publique, professeur à la faculté de droit et des sciences économiques des universités Paris X-Nanterre puis Paris I-Panthéon-Sorbonne, conseiller technique de 1970-72, au cabinet d’Olivier Guichard (ministre de l’Éducation nationale), directeur du département de science politique de la Sorbonne, directeur du Centre de droit constitutionnel, directeur de l’École doctorale de droit à l'université Paris I-Panthéon-Sorbonne, président de la section de Droit public du Conseil supérieur des Universités, conseiller scientifique à l’Institut français des Relations internationales. Il a terminé sa carrière à Washington comme chercheur au National Endowment for Democracy (1998-2000), à l’US Institute of Peace (2000-2001) enfin à la School of Advanced International Studies de l’université Johns Hopkins (2002-2004). Il a organisé avec le NED puis avec la SAIS deux colloques internationaux, mobilisant des intervenants de premier plan, tels Jacques Delors, Simone Veil, Catherine Lalumière, Justice Breyer, Zbigniew Brzezinski.


Sans pouvoir là aussi toutes les citer, des institutions prestigieuses l'ont accueilli, il fut membre de l’Académie de droit comparé, membre de l’Académie malgache, membre puis Président en 2007 de l’Académie des sciences d’Outre-Mer, membre de l’Académie roumaine, administrateur de la Fondation européenne Nicolae Titulescu, et aussi président-cofondateur de l'université de la Paix à Verdun (1998-2002).


On lui doit de très nombreux ouvrages de droit, ci-après une liste abrégée : la Fonction publique aux États-Unis (1956), les Institutions constitutionnelles des États d’Afrique Noire (1978), les Institutions administratives des États d’Afrique Noire (1979), le Droit constitutionnel de la cohabitation (en coll.), les Politiques de l’eau en Afrique (1985), la Constitution de la République française (co-dir., 1987, 3éd. 2009), les Cours suprêmes en Afrique (1988), la Déclaration des droits de l’homme (1990). Et aussi de nombreux articles dans des revues de sa spécialité.


Comme l'a écrit Didier Maus, aux membres de l'A.F.D.C., lors de l'annonce du décès de notre confrère :

« … Gérard Conac laisse un véritable héritage juridique et intellectuel. A nous d'en prendre la mesure. »


Daniel Bouix     

 


          1. 1. Décoration :

Officier de la Légion d’honneur, officier de l’Ordre national du Mérite, commandeur des Palmes académiques, chevalier du Mérite agricole, officier de l’Ordre national malgache, commandeur de l'Ordre national du Lion (Sénégal).

      1.    
          1. 2. Distinctions :

Prix de l'Académie des sciences morales et politiques 1994 et 1995, Docteur honoris causa de l'université de Bucarest (1994).



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